Les poulets farcis

Dr Nesrine Choucri Jeudi 24 Mai 2018-15:20:18 Shéhérazade raconte
Les poulets farcis
Les poulets farcis

Shéhérazade raconte tous les soirs des histoires au roi. Des histoires qu'elle a regroupées du fond de l'Egypte, mais qui sont riches en morale. Aujourd'hui, elle raconte l'histoire des poulets farcis.

Il était une fois un petit royaume réputé pour une reine très généreuse. Elle ne se contentait pas de jouer le rôle d’épouse du roi et de profiter du luxe. Elle était une femme généreuse au grand cœur et était d’une sagesse remarquable.

Jamais, elle n’a refusé de venir en aide à une personne qui a besoin d’elle. Les mendiants, elle les aidait constamment et tout le monde parlait de sa modestie. Un jour, un mendiant est arrivé sous sa fenêtre pour implorer le seigneur de le secourir, lui qui n’a pas mangé depuis des jours. Dans ses invocations, le mendiant n’a pas arrêté de pleurer et de demander à Dieu de nourrir son pauvre estomac affamé et vide.

Les invocations du jeune homme étaient mêlées à des larmes et des sanglots qui déchiraient les cœurs les plus cruels. La reine eut pitié de lui, elle lui a envoyé alors l’un de ses soldats lui demandant de lui remettre un paquet. Le soldat est allé à la rencontre du mendiant et lui a dit : « Son Altesse la reine vous envoie ce paquet ».

Le mendiant a ouvert immédiatement le paquet : « C’était un gros poulet grillé ». Il l’a pris et s’en est allé. La reine s’est sentie alors apaisée d’avoir pu calmer les pleurs de l’homme affamé.

Le lendemain, à la même heure du matin, la reine a entendu le même mendiant pleurer son sort et demander la grâce divine. S’apitoyant sur lui, elle lui envoie l’un des soldats afin de lui remettre un nouveau paquet. Le paquet comprenait aussi un gros poulet grillé. Le mendiant s’en empare et s’en va comme la dernière fois. Pendant dix jours, le mendiant revient tous les jours sous la fenêtre de la reine pleurait son sort et celle-ci continue à lui envoyer très fidèlement le paquet de poulet grillé. Le onzième jour, le mendiant est arrivé à la même heure pour quémander son poulet. Cette fois-ci la reine envoie le soldat pour le recevoir. Le mendiant se dit alors, je vais devenir un richissime. Certainement, elle va m’offrir une somme énorme.

A peine arrivé devant la reine que le mendiant était incapable de se contrôler, il voulait savoir combien recevrait-il  cette fois-ci. La reine s’est approchée de lui et lui a posé la question : 10 poulets ne vous ont pas enrichi ?

Le mendiant a commencé alors un discours éloquent qu’il avait préparé à l’avance lorsque le soldat le conduisait de la rue vers l’intérieur du château. « Oh ma noble reine, un pauvre comme moi affaibli par la misère et le sort, que lui ferait un poulet à part de remplir son estomac ?! »

Avant de poursuivre son long discours prévu sur l’indigence, la miséricorde de Dieu et la grâce de la reine, la reine lui a coupé la parole et lui a lancé une question en le fixant du  regard. On dirait qu’elle connaissait déjà les réponses. « Avez-vous mangé les poulets offerts par la reine vous-même ?! » Devant la question posée avec tant d’insistance, le mendiant a compris que son secret avait été dévoilé.

Mais, la reine n’a pas entendu de réponse et elle a continué à parler : « Je vous ai offert dix poulets grillés. Chaque poulet était farci d’une somme de 20 dinars. Si vous comptez… dix multiplié par vingt équivalent à 200 dinars. Deux-cents dinars ne vous ont-ils pas enrichi ? »

Le mendiant ne pouvait plus regarder la reine dans les yeux. Il ne pouvait donc que passer aux aveux : « Chaque jour, je donnais les poulets au restaurant du royaume. Il me les a achetés contre deux dinars et un plat de riz aux légumes. Il me volait mes dinars et moi je le ne savais pas ».

La reine lui a dit : « Oh, vous êtes cupide, Dieu vous a donné des poulets et des dinars. Au lieu d’en profiter, vous avez pensé exploiter ma bonté et mon indulgence. Vous me preniez pour une dupe, alors que c’était vous le dupe. Hélas! Vous avez perdu vos dinars et je ne vous offrirai plus rien.

A partir d’aujourd’hui, je vous impose de travailler au lieu de mendier. Si je vous entends ou vous vois mendier ou demander de l’aide, vous serez encore plus sévèrement condamné ».

Ce jour-là, le mendiant a appris une belle leçon de morale : « La cupidité est un chemin facile mais son aboutissement est amer ».

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